... car ce blog aussi éphémère qu'un papillon de nuit est mort de sa belle mort.
Pourquoi ? Parce que tout ce que j'écris ici, je peux clairement l'écrire ailleurs, dans un blog unique et multifonctions (un peu comme les canifs suisses ou les nouvelles imprimantes). Ce blog, c'est :
Le lieu se prête merveilleusement bien à ce genre de concert : il ressemble un peu à la Rotonde du Botanique, mais en mode inversé, et à l’extérieur. (En fait, à y réfléchir, ça n’a strictement aucun rapport avec la Rotonde – faut que je dorme la nuit, c’est tout.) Au crépuscule, le vieux kiosque à musique en fonte du Parc royal de Bruxelles, avec ses douze colonnes et son beau grillage vert orné d’oiseaux et de cors de chasse dorés, se pare des couleurs des lampes multicolores installées pour l’occasion dans les arbres alentour par l’équipe de l’Ancienne Belgique. Le ciel, d’abord bleu, devient menaçant en fin de soirée, mais ne cause aucun souci majeur. Une chance quand on sait que le matin même, un méchant cumulonimbus a recouvert la capitale, créant une nuit artificielle en plein jour et amenant son cortège d’averses et d’éclairs menaçants.
Nous sommes à une soirée des Feeërieën organisé par l’AB.
C’est en plein air et c’est gratuit.
Ce soir sur scène : Murder et les Canadiens de Timber Timbre.
Murder est un groupe danois fondé par Jacob Bellens et Anders Mathiasen, deux amis de longue date, rejoints ici par un discret contrebassiste. La composition est simple : Jacob – casquette vissée sur la tête et bouteille d’eau en main (?) – est au chant. Le gaillard n’a pas besoin de jouer d’un instrument : sa voix très particulière est son instrument. Anders – blond, mince, plus élancé que son comparse – joue de la guitare et s’occupe parfois des backing vocals. Aucune pose, aucune fioriture, si ce n’est quelques blagues (du genre, vers la fin du concert : "You can sit down now", alors que tout le monde est assis).
Le style ? Du folk ténébreux minimaliste, avec une voix grave qui fait directement penser à Johnny Cash. Rien de nouveau donc, mais des ballades simples et accrocheuses, des histoires à raconter... C’est majestueux comme un château de Fionie. Sorti en 2006, leur album Stockholm Syndrome, qui contient le très dépouillé "Naming the Demon" (voir ci-dessous) reçoit de très bonnes critiques de la part de la presse spécialisée et sera en outre encensé par Stuart Staple, le chanteur de Tindersticks, dont les Danois feront d’ailleurs les premières parties européennes en 2008. En 2010, sort l'album Gospel of Man (dont est tiré le "Providence" ci-dessous), qui reprend la même sombre recette.
"Féerique" est un mot qui correspond tellement bien au second groupe de la soirée, à savoir Timber Timbre, qu’on pourrait presque penser que le mini-festival a été organisé rien que pour lui. Quand Taylor Kirk, encapuchonné comme un moine, arrive avec sa guitare électrique et commence à chanter, battant la mesure avec une caisse à ses pieds, c’est l’envoutement immédiat. Avec aussi cette question lancinante : d’où vient ce gars et dans quel recoin de son corps va-t-il chercher cette voix possédée ? Celle-ci à quelque chose d’unique : souvent grave, avec des modulations soudaines vers les aiguës. Taylor Kirk a un don, c'est comme ça. La "légende" veut qu’il vienne d’un coin perdu de l’Ontario et qu’il ait composé, enregistré et autoproduit ses deux premiers albums tout seul ou presque, dans une cabane en bois.
Timber Timbre, c’est aussi deux autres personnes désormais : la violonniste Mika Posen (qui s’occupe également des claviers et de certains rythmes) et le guitariste Simon Trottier (qui officie entre autres à la lap steel et à l’autoharpe). Ensemble, ils arrivent à créer un univers bien à eux, combinant une musique atmosphérique à l’intersection du post-rock – ils sont Canadiens, ne l’oublions pas –, du blues et du folk.
Le groupe jouera de nombreuses chansons des deux derniers albums, Timber Timbre (2009) et Creep On Creepin’ On (2011), comme les superbes "Demon Host" ou "Black Water" avec ses chœurs épiques en fin de morceau (voir ci-dessous). Seul regret : celui de ne pas avoir entendu des mélodies provenant des deux premiers opus Cedar Shakes (2006) et Medicinals (2007). Ces deux-là avaient un son différent, plus amateur, ce qui n’était pas déplaisant pour l’amateur de lo-fi qui sommeille en moi. L’enregistrement était sans doute moins professionnel, l’instrumentation plus simple et la voix moins maîtrisée, mais les mélodies frappaient d’autant plus les esprits, justement : on s'en rendra compte avec des morceaux comme "As Angels Do", "It’s Only Dark" ou encore les très inspirés "UnderYour Spell" ou "Patron Saint Hunter".
Qu’importe : ce sera pour la prochaine fois, peut-être, lors de leur prochain passage.
Ce songwriter originaire de Pensacola (USA), à ne pas confondre avec le (très bon) batteur des Dirty Three qui porte exactement le même nom, est du genre "raconteur d'histoires", dans la lignée de Townes Van Zandt... Des histoires qui sentent bon les longues routes désertes, les villes fantômes et les stations-services du Sud des États-Unis... Bigre, il a l'air tellement sincère et sans artifice, seul avec sa guitare, que c'en est réellement désarmant...
Exemple avec "A Perfect Day to Chase Tornados" (Wrong-Eyed Jesus, 1997), une murder ballad touchante. Sometimes I think that the sky is a prison and the earth is a grave...
Un autre exemple avec le clip inquiétant de "Ghost Town of my Brain" (No Such Place, 2011) :